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Critique de Madame Danièle Gasiglia-Laster sur le prochain roman de Virginie Cadot,
 Victor Hugo, Mort ou vif !

Page wikipedia : Écrivain et critique française, Danièle Gasiglia-Laster est spécialiste de Victor Hugo, de Marcel Proust et de Jacques Prévert.


  Le fantôme de Juliette Drouet vient rendre visite à Victor Hugo et tente de s’insinuer dans son esprit. Juliette a l’impression qu’il pense à elle, qu’ils ne font plus qu’un. Elle se souvient du passé. C’est par cette évocation onirique que commence le livre de Virginie Cadot, qui mêle fiction et réalité dans cet hommage vibrant à Juliette Drouet. Pourquoi Juliette suscite-t-elle aujourd’hui tant d’admiration et d’amour ?  Pourquoi les actrices qui l’incarnent, comme les femmes qui en parlent ou écrivent sur elle, s’identifient-elles à celle qui ne vécut que pour Hugo, pour l’aimer, le vénérer, d’un amour passionné et souvent douloureux  et qui en cela n’est pas vraiment l’incarnation de la femme moderne et libre ? Peut-être parce qu’elle est tout simplement à leurs yeux le symbole même de l’amour absolu et que l’amour continue à faire rêver. Virginie Cadot n’échappe pas à cette fascination. On sent d’emblée qu’elle éprouve une immense tendresse pour celle qu’elle choisit pour narratrice de son histoire – quelle jolie idée ! 

L’auteure puise abondamment dans les lettres de Juliette, ses écrits, ceux de Hugo aussi, parfois, mais elle a l’honnêteté de faire imprimer en italiques tous ses emprunts, ce qui permet au lecteur de savoir ce qui est de Juliette et de Victor et ce qui relève de l’imagination de Virginie. On ne peut que saluer ce scrupule. Les points de vue varient au cours du récit puisqu’on passe par moments à la troisième personne du singulier, par exemple au cours d’un chapitre qui met face à face Madame Hugo, l’épouse du poète, et Léonie Biard, autre grand amour de Victor Hugo, la rivale la plus dangereuse qu’ait eue à affronter Juliette. Cet épisode est très réussi. Virginie Cadot montre deux femmes qui s’unissent contre l’intruse, celle qu’elles trouvent toutes les deux trop encombrante, mais qui ne s’aiment pas et ne manquent pas de s’envoyer, sans insistance mais avec une certaine volupté, quelques petites piques bien acérées.

Les retrouvailles secrètes avec Léonie après le coup d’Etat, au moment où Hugo, recherché par la police de Napoléon III, est obligé de se cacher, sont pure hypothèse. Mais après tout, Virginie Cadot écrit un « roman » historique. Elle peut donc se permettre de combler des vides. Elle s’est d’ailleurs beaucoup documentée pour nous raconter cette période agitée de la vie du grand homme.et les quelques éléments de son récit qui relèvent de son imagination sont parfois du domaine du possible. Le sérieux de sa bibliographie montre qu’elle a souvent puisé aux bonnes sources. Elle ne manque pas, d’ailleurs, d’encadrer son livre d’éléments éclairants et documentaires : un extrait de la biographie de Jean-Marc Hovasse, un petit chapitre sur le contexte historique, des poèmes de Hugo inspirés par Juliette, un tableau de « l’emploi du temps synchronisé » de Juliette et de Victor du 2 au 13 décembre 1851. Le livre est conçu en profonde sympathie avec ses deux principaux personnages et on a l’impression que Virginie Cadot, dans ses fantasmes les plus fous,  rêve d’avoir été la Juliette de Victor.

                                                                                              

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